jeudi 28 août 2014

Villenauxe-la-Grande - Prise d’otage au centre de détention : deux ans ferme

Une fois de plus, un gardien a subi la froide détermination d’un détenu prêt à tout pour être transféré.   
L’agression aura duré douze longues minutes. De celle que l’on connaît trop fréquemment. Celle qui se déroule entre les murs d’une maison centrale ou d’un centre de détention. Un surveillant pris en otage. Un homme, dépositaire de l’autorité publique, malmené, agressé, violenté par un détenu revanchard, ivre d’une froide détermination.

En juillet dernier, au centre de détention de Villenauxe-la-Grande, un gardien a connu ce que les autres ont souvent décrit avant lui. Il est 16 h 28 et le temps vient de s’arrêter à l’intérieur d’une cellule.

Arme artisanale

Sylvère Pinchaud est incarcéré depuis 2010. Des mois qu’il réclame son transfert vers un établissement pénitentiaire de région parisienne, où demeure sa famille. Ce 26 juillet, il froisse sa nouvelle demande et choisit d’agir. « Je n’ai pas eu la force de patienter », plaide celui qui, en raison d’un avocat en grève, se défendra seul. « Mais ils ont fait de moi un lion à force d’isolement, de mitard et d’unité spécialisée. »
Cet après-midi où tout a dérapé, il sort l’arme artisanale qu’il a dissimulée sous une serviette. Il saisit par le cou le surveillant qui l’escorte et le menace directement. Dans le huis-clos d’une cellule, le temps défile au rythme de la négociation rapidement engagée. Durant douze minutes, le jeune surveillant, âgé de 26 ans, lit la détermination dans les yeux de son agresseur. La colère aussi. « Je suis prêt à tout, je n’ai plus rien à perdre », lâche alors le détenu.

Calvaire

À plusieurs reprises, les collègues du gardien tentent d’intervenir. Alors que celui-ci sent la lame s’enfoncer un peu plus dans son cou, il parvient à simuler un malaise qui déstabilise Pinchaud. Les surveillants interviennent et signent ainsi la fin du calvaire.

À l’audience, il reconnaît. « C’est la seule solution qui s’est imposée à moi. Je regrette, je présente mes excuses, mais à l’époque, je n’ai pas su agir autrement. »

Avec vingt mentions à son casier judiciaire, dont deux concernant des violences commises à l’encontre de dépositaires de l’autorité publique, le prévenu sait qu’il risque gros. « Au moment où je passe à l’acte, je me moque de prendre plus. Je veux être transféré. Et puis, la liberté, je ne sais même pas ce que c’est. »

Conseil des surveillants, Me Lemoult s’attarde sur un mode de fonctionnement « qui progresse : celui de prendre en otage pour obtenir gain de cause ». Une situation qui interpelle autant qu’elle interroge. « Si vous ne stigmatisez pas ce type d’agissements, je ne sais pas ce qu’il adviendra. » L’avocat, qui vient au soutien d’un personnel « meurtri par l’agression », ajoute : « Doit-on l’accepter ou préserver (les gardiens) dans le cadre de leurs missions ? »

Les excuses de façade n’amèneront pas de retenue dans le cadre des réquisitions du ministère public. La séquestration, la violence et la préméditation devront être sanctionnées à la mesure « de leur extrême gravité ». Cinq ans seront les réquisitions.

À l’issue du délibéré, Sylvère Pinchaud a été condamné à trois ans de prison dont un assorti d’un sursis et d’une mise à l’épreuve de deux ans. Le tribunal a par ailleurs ordonné mandat de dépôt à l’audience.
www.lest-eclair.fr

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