jeudi 16 juin 2016

En prison, Larossi Abballa avait prévenu que son "heure allait arriver"

Le tueur du couple de policiers à Magnanville, qui a agi au nom de Daech, avait effectué des séjours dans quatre prisons différentes entre 2011 et 2013. 

Avant d'être abattu par les policiers du Raid à Magnanville (Yvelines), Larossi Abballa a enregistré une vidéo dans laquelle il désigne les gardiens de prison comme des cibles.

Les surveillants pénitentiaires se souviennent d'un détenu ostensiblement radicalisé et manipulateur.

La séquence dure une dizaine de minutes et n'est qu'un condensé de haine, entre appels au meurtre et justifications du djihad.



Quelques instants après avoir assassiné à l'arme blanche deux policiers, lundi soir à Magnanville (Yvelines), Larossi Abballa se filme et diffuse la vidéo sur Facebook. Le terroriste de 25 ans est alors retranché au domicile des victimes, cerné par les forces d'élite du Raid. Au nom de l'organisation Etat islamique (EI), il désigne plusieurs cibles "à tuer" et notamment, fait inédit, les surveillants pénitentiaires.

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L'homme, qui sera abattu par la suite, connaît bien cette profession, qu'il qualifie de "bras exécutif des autorités mécréantes". Il a été placé en détention provisoire entre mai 2011 et septembre 2013, date à laquelle il est condamné pour terrorisme dans un dossier de filière afghano-pakistanaise. Avec d'autres jeunes de la banlieue parisienne, Abballa est accusé d'avoir suivi une préparation physique et religieuse en vue de combattre dans les zones tribales du Pakistan. Malgré son empressement, il ne mettra jamais les pieds sur place.

"Sa détention n'a pas arrangé les choses"

Durant son incarcération, l'ancien délinquant, connu jusqu'ici pour de simples vols, a séjourné dans quatre établissements différents:

La prison d'Osny (Val-d'Oise), entre le 14 mai 2011 et le 26 juin 2012
La maison d'arrêt Le Mans-Les Croisettes (Sarthe), entre le 26 juin 2012 et le 7 juin 2013
La maison d'arrêt de Châlons-en-Champagne (Marne) entre le 7 juin 2013 et septembre 2013
La prison de la Santé (Paris), en septembre 2013 jusqu'au procès

A-t-il développé sa haine des gardiens de prison derrière les barreaux? Comme l'a indiqué le procureur de Paris, Abballa est en tout cas signalé à plusieurs reprises par l'administration comme radicalisé et prosélyte. Et, selon plusieurs sources pénitentiaires contactées par L'Express, ses multiples transferts s'expliquent par l'influence néfaste qu'il possédait sur ses codétenus et la menace qu'il représentait.


A Osny, un surveillant se souvient "d'un garçon aux cheveux courts, barbe naissante et djellaba". Le futur terroriste se lie d'amitié avec plusieurs individus soupçonnés aussi d'être radicalisés. "Ces signes religieux ostensibles sont courants dans les prisons franciliennes. A l'époque, il n'y avait pas encore d'attentats, pas de quartier dédié à ce type de détenus. Son comportement a été signalé mais il n'a pas été isolé, juste davantage suivi", explique cette source.

Des rapports réguliers sont écrits et transmis à l'administration. "Son passage en prison n'a pas arrangé les choses", résume un autre surveillant, qui n'a toutefois pas le souvenir d'un quelconque acte violent.

"Il est parvenu à manipuler les faibles"

D'après Le Monde, Abballa commence à endosser un rôle de petit leader religieux. Il lance des appels à la prières, se promène avec un Coran et cherche même à recruter des aspirants djihadistes. Transféré au Mans un an plus tard, le jeune homme poursuit son militantisme islamiste et adopte une attitude ambiguë. "Quand il est arrivé, il avait le même crâne rasé et collier de barbe que sur sa vidéo de propagande", décrit un gardien de prison, interrogé par L'Express. Au début, il était prosélyte avec les autres détenus mais restait gérable. Il se montrait plutôt patient voire respectueux avec les gardiens. Cela lui arrivait d'être menaçant mais jamais physiquement."

Même si les détenus radicalisés sont rares au Mans, Abballa, décrit comme doté "d'une petite aura", fédère quelques soutiens. L'un de ses proches, admis en même temps que lui, est toujours incarcéré là-bas. "Il est parvenu à manipuler les faibles d'esprits et faibles physiquement", explique encore le maton.

Lorsque l'imam du culte musulman se déplace, il l'accuse de ne pas "prêcher la bonne parole" et d'être "trop modéré". Un autre jour, l'ancien délinquant tente de lancer un mouvement de fronde contre les repas halal, accusant l'entreprise qui les fournit d'être "mal répertoriée". "Ce sont plein de petits détails qui font qu'il était dans une pratique endurcie de la religion. Par exemple, il ne demandait que rarement la télévision. C'est le choc pour nous de se dire que nous avons surveillé un futur terroriste", développe cette source pénitentiaire.

"Il voulait évacuer une frustration et une colère"

Une phrase étrange résonne encore dans la tête du surveillant. "Abballa a dit que son heure viendrait bientôt, un peu comme s'il était fataliste", raconte-t-il. Le djihadiste a t-il déjà en tête des plans funestes? A-t-il trompé son monde en se faisant passer pour un repenti à sa sortie de prison? Maître Hervé Denis, qui a défendu l'un de ses complices dans le dossier de filière afghano-pakistanaise, en doute. "C'était plutôt un groupe de bras cassés. Abballa n'était pas un élément moteur mais un suiveur. Il n'était pas brillant et plutôt limité intellectuellement. Pour moi, il a choisi l'islam radical comme il aurait pu choisir une autre idéologie à une autre époque. Il voulait évacuer une frustration et une colère. La prison n'a fait que renforcer tout ça", analyse l'avocat.

Aucune faille dans son enfance n'a été décelée au cours du procès...

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